La sclérose en plaques a été diagnostiquée pour la première fois en 1868 par le docteur Jean-Martin Charcot, mais la lésion anatomique de la moelle a été décrite dès 1838 par Robert Carswell2. En 1885 Joseph Babinski lui consacre un traité.
Les causes de la sclérose en plaques sont imparfaitement connues. Elles associent des facteurs génétiques (la famille d'un malade a plus de risque d'être touchée que la population générale), des facteurs environnementaux (les pays tempérés sont beaucoup plus touchés que les pays tropicaux, quelle que soit l'origine ethnique, probablement en raison d'une diminution de l'exposition aux UV et donc de la vitamine D) et un facteur déclenchant de la maladie (probablement infectieux, par hypersensibilité et naissance d'une réponse auto-immune après une infection banale). À ce titre, on retrouve chez les patients atteints de SEP un taux très élevé d'anticorps dirigés contre certains virus (en particulier la rougeole et le virus Epstein-Barr3).
La sclérose en plaques est donc une maladie auto-immune (liée à l'activité anormale de certains anticorps dirigés contre la gaine de myéline des fibres nerveuses) déclenchée après un événement probablement viral, chez un sujet génétiquement prédisposé à la maladie.
Les formes familiales ne sont pas rares avec un risque multiplié par 9 si l'un des membres de la fratrie est atteint4. Depuis les années 1970, des gènes associés dans la survenue de la maladie ont été peu à peu découverts, en particulier au niveau du groupe HLA5. En juillet 2007, deux variants de gènes ont été identifiés, IL2RA et IL7RA, tous deux codant des récepteurs aux interleukines intervenant dans l'immunité et dont la présence augmenterait (faiblement) le risque de développer la maladie6.
Elles consistent en des plaques plus ou moins étendues de démyélinisation au sein de la substance blanche du système nerveux central (constituée de fibres nerveuses, c’est-à-dire de prolongements neuronaux : les axones). Ces fibres nerveuses sont normalement entourées d'une gaine de myéline constituée par les oligodendrocytes au niveau de l'axone (début du neurone) et constituée de plus, au niveau du nerf, par les cellules de Schwann (celles-ci recouvrent la gaine de myéline qui est une couche lipidique formée par l'enroulement de la membrane plasmique de la cellule de schwann), qui assument ce rôle dans le système nerveux périphérique (qui lui n'est pas touché par la SEP), qui est détruite lors d'une poussée de la maladie : la gaine est détruite, mais l'axone est intact. Cette démyélinisation entraîne une altération de la conduction électrique dans l'axone (les informations transitent moins vite, mal voire pas du tout), ce qui aboutit à des signes cliniques variés, qui apparaissent en quelques jours. La particularité de cette maladie est son évolution, marquée par des phases de poussées (lors de la constitution d'une nouvelle zone de démyélinisation) et de rémission (lorsque la plaque cicatrise, avec remyélinisation partielle) avec amélioration parfois spectaculaire des symptômes. Malheureusement, avec le temps, les nouvelles poussées cicatrisent moins bien, et les altérations neurologiques finissent par ne plus régresser, constituant des lésions définitives. Le rythme des phases de poussées/rémission est très variable d'un individu à l'autre, ce qui fait que pour certains la maladie reste très longtemps sans impact majeur en dehors des poussées, alors que chez d'autres une détérioration rapide de la qualité de vie survient en rapport avec des poussées fréquentes et peu résolutives. Il existe aussi la forme évolutive qui consiste en une poussée permanente.
Elle touche environ 80 000 personnes en France (prévalence), et environ 2 000 personnes de plus par an7 (incidence). 70 % des nouveaux patients sont de jeunes adultes entre 20 et 40 ans, dont près de deux tiers de femmes. Il s'agit de la première cause non traumatique de handicap sévère acquis du sujet jeune8.
La survenue des crises semble être plus rare chez les femmes enceintes et plus fréquente au cours des trois premiers mois après l'accouchement9. De même, elle semble favorisée par certaines infections virales10,11. La vaccination reste soumise à débat12.
La maladie débute typiquement entre 20 et 40 ans (70 % des SEP sont diagnostiquées entre 20 et 40 ans, 10 % dans l'adolescence et 20 % après 40 ans). Elle peut aussi toucher, rarement, des enfants de moins de 10 ans et touche trois femmes pour un homme13. 3 % des cas sont diagnostiqués chez les personnes de 50 ans et plus.
Certains éléments caractéristiques doivent faire suspecter une sclérose en plaques : des accidents neurologiques répétés, régressifs (au moins en début de maladie), touchant des fonctions variables (vision, motricité, sensibilité, etc.) : les poussées sont disséminées dans le temps et dans l'espace.
Le syndrome pyramidal est inaugural (révélateur) de la maladie dans 20 % des cas, et se manifeste par des troubles de la marche avec une fatigabilité importante, une spasticité, des réflexes exagérés au niveau des membres inférieurs, la présence d'un signe de Babinski, une abolition des réflexes cutanés abdominaux. À l'issue de la poussée, le signe de Babinski reste souvent comme séquelle.
La névrite optique rétro-bulbaire est également révélatrice de la maladie dans près d'un tiers des cas : c'est le symptôme le plus évocateur. Il se manifeste pour le malade par une baisse d'acuité visuelle rapide et profonde, des douleurs oculaires etorbitaires, augmentées aux mouvements des yeux, un scotome central ou caeco-central et un trouble de la vision des couleurs (dyschromatopsie de l'axe rouge-vert). Au stade aigu, le fond d'œil est normal (« le patient ne voit rien, et l'ophtalmo non plus »), et ce n'est qu'après une quinzaine de jours qu'apparait une atrophie de la papille, témoin de l'atteinte du nerf optique et persistant parfois comme séquelle. Les potentiels évoqués visuels sont altérés, on obtient un ralentissement de l'onde P100. La récupération visuelle est souvent bonne et se fait en quelques semaines.
Il existe des troubles de la sensibilité. Ils sont essentiellement subjectifs : paresthésies, fourmillements, signe de Lhermitte positif (sensation de décharge électrique le long du rachis lors de la flexion du cou). On retrouve parfois un syndrome cordonnal postérieur avec des troubles de la sensibilité profonde, et plus rarement une atteinte du faisceau spinothalamique avec une anesthésie thermo-algésique. Des douleurs de la face (ou, à l'opposé, une anesthésie) sont possibles en cas d'atteinte du nerf crânien dans sa portion bulbaire.
La maladie peut également se manifester par :
Des troubles psychiques, avec une modification du comportement sous forme de dysthymie (trouble de l'humeur) plus ou moins marquée, sont fréquents. Son origine, bien qu'assez rare, peut être consécutive à des lésions cérébrales liées à la SEP affectant les zones du système limbique (structure subcorticale située autour du thalamus). Cependant, dans les faits, ces troubles sont la plupart du temps associés à un état d'anxiété sous-jacent engendré par l'incertitude de la maladie. Cet état d'anxiété chronique exacerbe les traits caractériels extrêmes. Il est par conséquent courant d'avoir affaire à des sujets irritables, de mauvaise humeur, voire agressifs. De même, une dépression est décrite dans près de la moitié des cas4.
Ces comportements à tendance paranoïaque (personnalité paranoïaque) peuvent entraîner des dysfonctionnements d'ordre relationnel avec l'entourage du sujet. Ils peuvent conduire à des tensions extrêmes au sein des familles et des couples. La prise en compte de la maladie dans le règlement des conflits familiaux ne doit donc pas être écartée sous peine de conduire à des situations conflictuelles permanentes et durables. Une bonne compréhension associée à une grande indulgence envers les sujets malades s'impose donc.
Le traitement par la psychothérapie cognitivo-comportementale peut donner de bons résultats dans certains cas. La dépression est également fréquente au cours de la sclérose en plaques, à la fois en raison des manifestations pénibles de la maladie, mais aussi à cause des lésions cérébrales caractéristiques de la maladie et de leurs répercussions sur l'humeur. Une excitation psychique (syndrome maniaque) est plus rare mais possible.
L'IRM représente le meilleur examen pour visualiser les lésions caractéristiques de la SEP : on retrouve en séquence T2 des zones d'hypersignal (c’est-à-dire très blanches) de taille variable, de forme arrondie, sans effet de masse sur les autres structures, disposées préférentiellement autour des ventricules cérébraux, dans la moelle, et dans la fosse postérieure. En séquence T1, ces zones peuvent être en iso ou en hyposignal.
Les lésions visualisées sont souvent anciennes et asymptomatiques. Les lésions jeunes, responsables de la poussée en cours, se remarquent car elles prennent le contraste lors de l'injection de gadolinium (elles se rehaussent). Ces signes ne sont pas spécifiques de la sclérose en plaques, et se voient fréquemment chez le sujet âgé normal.
Ainsi, en cas de diagnostic incertain, une IRM peut à tort qualifier de malade un patient qui en est indemne15 : c'est essentiellement la conjonction temporelle entre accident neurologique et plaques jeunes qui fait la valeur de ces images IRM. L'évolution clinique reste cependant l'élément le plus utile au diagnostic : 2 poussées distinctes à plus de 30 jours d'intervalle ou deux lésions de localisations différentes.
La ponction lombaire n'est pas toujours indispensable au diagnostic. Elle a une intéressante valeur diagnostique lorsqu'elle retrouve un liquide céphalo-rachidien inflammatoire, avec un taux de protéines élevé (inférieure à 1 g/l, la normale étant de moins de 0,4 g/l) et au sein de ces protéines une proportion trop élevée d'immunoglobulines (plus de 14 %), qu'une électrophorèse démontrera être de nature oligoclonale (c’est-à-dire constituée de plusieurs types d'immunoglobulines). Enfin, une lymphocytose modérée inférieure à 50 lymphocytes par millimètre cube de liquide céphalo-rachidien.
Leur étude retrouve fréquemment un allongement du temps de latence centrale.
Les critères ont été publiés en 200116 et modifiés en 200517. Le diagnostic recherche une dissémination dans le temps et l'espace des lésions.